Une réconciliation contestée
L’affaire de la répression de Tanjung Priok
Violence, justice et fabrique de l’après-violence en Indonésie (1984 – 2005)
Le vendredi 10 novembre 2017 à partir de 14h en salle 13, à l’EHESS, 105 boulevard Raspail, 75006 Paris
Le jury sera composé de
Mme Élisabeth CLAVERIE, Directrice de Recherche Émérite au CNRS, directrice de thèse
M. John BOWEN Professeur Washington University, Saint Louis, rapporteur
M. Jérôme TOURNADRE Chargé de recherche CNRS, rapporteur
M. Alban BENSA Directeur d’études EHESS
M. Nicolas DODIER Directeur d’études EHESS
Mme Sandrine LEFRANC Chargée de recherche CNRS
M. Jean-Louis MARGOLIN Maître de conférence Université Aix-Marseille 1, examinateurs
Résumé :
Pourquoi certains crimes d’État ou de masse sont-ils jugés au sortir d’un régime autoritaire ou d’une guerre civile, tandis que d’autres épisodes de violence voient leur traitement judiciaire en suspens ? Pourquoi passe-t-on parfois par des procédures ou institutions dites de « réconciliation » ? Ces dernières constituent-elles des formes de contournement de la justice ? La thèse tente de répondre à ces questions à l’aune d’un cas de violence survenu en 1984 en Indonésie. Tranchant avec un climat national souvent qualifié d’impunité des auteurs suspectés de violations graves passées, la « tragédie de Tanjung Priok » n’est pas restée sans suites. En 2003, cinq années après la démission de Suharto, quelque quinze militaires qui avaient été déployés sur les lieux lors du massacre furent jugés pour « crimes contre l’humanité » devant un tribunal national ad hoc des droits de l’homme. Or, une charte de «réconciliation», dite charte d’ishlah, se référant au droit islamique, signée avant le procès par les accusés et une partie des victimes, a déclenché une controverse et suscité l’embarras des acteurs institutionnels. Pour comprendre les enjeux de cette « réconciliation », ce travail fait dialoguer une revue comparative des mécanismes de justice transitionnelle à l’échelle internationale, avec un portrait de l’Indonésie en transition et une reconstitution historique des scènes-clés et polémiques ayant marqué l’ensemble d’une l’affaire qui s’étend sur plus de vingt ans. La thèse se démarque des descriptions surplombantes des lendemains de violence en insistant sur les dynamiques locales à l’œuvre sur une temporalité longue, à partir de sources variées (entretiens, tracts, procès, presse), depuis la contestation souterraine de la violence sous Suharto jusqu’aux années 2000. L’approche ici développée se distingue néanmoins des analyses centrées sur le déterminisme des structures pour mettre en lumière les effets de concaténation générés par la mondialisation des pratiques de justice transitionnelle.
Mots-clés : justice transitionnelle, Indonésie, islam, réconciliation, contestation, autoritarisme, démocratisation, règlements alternatifs des conflits.
La soutenance sera suivie d’un pot de convivialité auquel vous êtes cordialement invités.
Clotilde Riotor
Doctorante en sociologie
IMM / EHESS